- TÉMOIGNAGE (droit)
- TÉMOIGNAGE (droit)TÉMOIGNAGE, droitSous l’Ancien Régime, le témoignage n’était pas, comme l’aveu, la probatio probatissima , mais seulement une demi-preuve (probatio semiplena ); deux témoignages constituaient cependant une preuve entière (probatio plena ) et suffisaient, s’ils concordaient, à entraîner une condamnation capitale. Aussi, lorsqu’on parvenait à confondre le témoin, était-il puni de la peine de mort, si telle avait été la peine prononcée à l’encontre de sa victime, de toute façon et dans les autres cas, de l’arrachement de la langue ou, s’il avait juré, de la section du poignet.Témoigner est, au regard du droit français, une obligation lorsqu’il s’agit, en matière pénale, de le faire en faveur d’un innocent; l’omission est sanctionnée d’une peine de trois ans d’emprisonnement et d’une amende de 300 000 francs, excepté pour l’auteur ou le complice de l’infraction et sa famille ainsi que son conjoint; le témoignage tardif mais spontané enlève cependant tout caractère délictueux à l’acte. Le refus de témoigner après en avoir été requis est puni, suivant que le procès est civil ou pénal, d’une amende civile de 100 à 10 000 francs (art. 207 du Code de procédure civile) ou d’une amende pénale de 3 000 à 6 000 francs (art. 109 du Code de procédure pénale). Cela ne veut pas dire que toutes les excuses ne soient pas recevables, mais bien qu’elles constituent des questions de fait; parmi les faits justificatifs, citons le secret professionnel.Si certaines personnes peuvent et doivent témoigner, il en est d’autres qui ne le pourraient ni ne le devraient sans gravement porter atteinte aux droits de l’individu devant la justice répressive. Ainsi, dans le procès pénal, ne peuvent être reçues sous la foi du serment les dépositions du père, de la mère ou de tout autre ascendant de l’accusé, ou de l’un des autres accusés, présent et soumis aux mêmes débats; il en est de même de celles du fils, de la fille ou de tout autre descendant; des frères et sœurs; des alliés au même degré; du mari ou de l’épouse, prohibition qui demeure même après le divorce ou la séparation de corps; il en est encore de même de celles des enfants âgés de moins de seize ans (art. 335 du Code de procédure pénale). Quoique la jurisprudence ait déclaré qu’il s’agissait là d’une liste limitative, elle a cependant été amenée à l’élargir; ainsi est allié de l’accusé le fils du premier lit de sa femme. La prohibition d’entendre comme témoins les parents ou alliés de l’accusé ne se limite pas à leur déposition pour ou contre lui, mais s’étend à leur témoignage à l’égard de ses coaccusés présents et soumis aux mêmes débats. Le plaignant qui ne s’est pas constitué partie civile peut être entendu comme témoin, ce qui d’ailleurs est fortement attentatoire aux droits de l’individu poursuivi devant les juridictions répressives; le juge doit, il est vrai, apprécier le degré de confiance que méritent ses déclarations, mais cela n’apporte qu’une restriction de principe à l’atténuation de la garantie. En revanche, dès que le plaignant se constitue partie civile, il devient partie au procès et cesse d’être témoin; un arrêt peut donc valablement, après l’audition d’un témoin sous la foi du serment, lui donner acte de sa constitution de partie civile et annuler le serment qu’il avait précédemment prêté mais, malheureusement, il ne s’agit pas là d’une attitude systématique de la cour; celle-ci n’est d’ailleurs, même si elle agit ainsi, jamais obligée de faire remarquer au jury que la déposition ne vaut plus que comme simple renseignement. Cependant, l’audition des personnes ci-dessus, sous serment, n’entraîne pas nullité lorsque, aux termes de l’article 336 du Code de procédure pénale, «le ministère public, ni aucune des parties ne s’est opposé à la prestation du serment. En cas d’opposition du ministère public, ou d’une ou plusieurs des parties, le témoin peut être entendu à titre de renseignements, en vertu du pouvoir discrétionnaire du président». Il peut arriver encore, devant les juridictions d’instruction, qu’un suspect soit entendu par le magistrat instructeur à titre de témoin, bien que de lourds indices pèsent sur lui; il ne sera inculpé que plus tard. Un tel procédé est fortement attentatoire aux droits de la défense, car un témoin, au contraire d’un inculpé, n’est pas entendu en présence de son conseil. Dans le procès civil, l’article 206 du Code de procédure civile dispose que «peuvent être dispensées de déposer les personnes qui justifient d’un motif légitime. Peuvent s’y refuser les parents ou alliés en ligne directe de l’une des parties ou son conjoint, même divorcé».L’individu qui témoigne se rend coupable d’une infraction s’il ne rend pas compte sciemment de la vérité.Si les articles 434-13 à 434-14 du nouveau Code pénal établissent les peines applicables au faux témoignage, ils ne définissent cependant pas l’infraction, pas plus que ne le faisaient les articles 361 et 364 de l’ancien Code. Selon la jurisprudence le faux témoignage apparaît comme une altération devenue irrévocable de la vérité, altération effectuée sciemment par une personne déposant sous serment à titre de témoin, devant toute juridiction (y compris les juridictions d’instruction). Quoique complète, cette définition manque de précision: qu’est-ce en effet qu’une altération de la vérité? La réticence à répondre est-elle constitutive du délit? La jurisprudence répond négativement à cette question, mais à condition que le témoin n’ait pas trompé la religion du juge, quant au sens de la déposition; cependant, le fait d’effectuer une déposition négative, en prétendant faussement, par exemple, ne pas avoir été témoin, est constitutif du délit. Le caractère irrévocable de la déposition signifie que le délit n’est constitué que si le faux témoin ne s’est pas rétracté avant la clôture des débats: si la détermination de cette notion ne fait pas de difficultés en matière criminelle, elle en a suscité en matière correctionnelle et de police; la jurisprudence a décidé que la clôture des débats résultait du jugement. Cependant, la décision de renvoi pour qu’il soit statué sur l’incident de faux témoignage, soulevé en cours d’audience, rend la déposition définitive.
Encyclopédie Universelle. 2012.